C’est l’histoire atypique de Maggie, ma colocataire, une autrichienne de 30 ans venue vivre à Buenos Aires pour faire une pause dans sa vie ; oublier la dizaine d’années à combattre la maladie à travers le monde jusqu’au dégoût, oublier le stress et l’individualisme des nos sociétés occidentales ; oublier tout cela, ici , avec l’aide du tango.
Trois ans déjà qu’elle s’est lancée dans ce projet ; trois ans qu’elle arpente, chaque soir, les milongas de Buenos Aires (salles de spectacles de tango), trois ans qu’elle pense, vit et mange tango.
Et ce soir c’est le grand jour. Elle a l’honneur, rare pour une étrangère, de réaliser un show de tango en compagnie de son compagnon professionnel Rafael. Ils se représentent dans la périphérie de Buenos Aires (quand je dis périphérie c’est 1h30 de train…) dans une petite salle cosy, intime et surchauffée.
Elle est là sur scène, dans une superbe robe bleue moulante, le regard fermé, le corps tendu, les premiers pas peu assurés. Et puis, au fil de la musique et de la confiance donnée par son partenaire, les gestes se font plus détendus, plus surs d’eux, et sa grâce prend le relais. Elle est dans son élément, dans sa bulle, comme si rien ne l’atteignait dans ces moments là, son moment à elle.
Après deux danses c’est malheureusement déjà fini ; elle est souriante, émue et heureuse comme rarement nous l’avons vu ; heureuse d’avoir accompli son rêve. Et nous le sommes tous autant qu’elle, nous les colocataires ; heureux pour cette femme qui a trouvé son équilibre et son épanouissement dans les plaisirs simples de la vie…